Les dérives de la mondialisation jusque chez les vendangeurs dans les vignes de Pauillac
Tandis que, dans le Bordeaux des belles bâtisses et des grands noms, celui des bouteilles qui se vendent à des prix déraisonnables jusque dans les rayons surchauffés et ultra-lumineux des rayons des hypermarchés, on se prépare à faire la guerre pour défendre son « Château » contre ces perfides d’américains qui voudraient bien s’en emparer, pour parer, un peu plus, de beaux atours leur propre exploitation vinicole, des batailles de rues voient le jour, la nuit dans la campagne de Pauillac.
Château, Chatréal, Castle
Les Châtelains ont de quoi être énervés ! Non sérieusement, déjà ça a commencé avec la Chine et son réflexe de photocopieur convulsif, irritant des susceptibilités justifiées à la vue de certaines bouteilles de Chatreal Cheval Blanc et Chatreal Margaux. Ce n’est pas parce qu’ils ont redonné des couleurs aux grands noms de Bordeaux qu’il faut leur excuser cette petite manie fort désagréable de vouloir tout imiter.
Et maintenant c’est au tour des américains de vouloir carrément recopier sur leur propre étiquette le mot de château. En français ou en anglais ? Non, parce que je me disais, ça fait moins chic de dire « castle » non ? (pour les quidams qu’entravent pas l’english, prononcer « casseul »).
Je ne peux que vous inviter à lire cet article sur la feuille de vigne pour en savoir plus sur ce passionnant sujet (http://www.lafdv.fr/std/251-la-guerre-des-clos-et-des-chateaux)
Tension à Pauillac
Pendant ce temps-là, à l’endroit même où le vin se fait, dans la vigne, à l’endroit même où les petites mains demeurent indispensables, sur la terre, à l’endroit même où une parcelle de par son emplacement vaut tout l’or du monde, les effets de la mondialisation perturbent le calme habituel de la campagne sur la commune de Pauillac. Pour ceux qui ne connaissent pas, Pauillac c’est un des terroirs prestigieux du Médoc avec quelques crus (si l’on en croit ceux qui les classent) comme Lafite-Rothschild, Latour, Pontet-canet, Lynch-Bages. Pour vous donner une idée, le millésime 2000 de Lafite-Rothschild se vend au-delà des 2000 euros la bouteille et ils en produisent, au plus bas, 90000 par an sans compter le second vin. Le luxe est une industrie, n’est-ce pas ?
Bref, sur ces hectares de vignes miraculeuses qui transforment le jus de raisin en valeur sûre de bon père de famille, s’est développé un conflit entre vendangeurs, avec l’arrivée flagrante d’un grand nombre d’espagnol du fait de la crise. Deux nuits de bagarres entre jeunes français d’origine marocaine installés à Pauillac et ces nouveaux arrivés d’Espagne, juste devant la mosquée.
Un sacré grand écart dans le vignoble bordelais avec ces travailleurs soumis à la précarité qui se disputent les miettes d’un marché du luxe qui n’a que faire d’eux et des conséquences de leurs manigances financières.
Moi qui vient de pondre un article (A lire sur la feuille de vigne) sur les 3 modes de vendanges que l’on observe aujourd’hui dans le vignoble, bénévole, payée et payante, en affirmant que tout va bien dans le meilleur des mondes, j’ai l’air malin ! Le vignoble n’est pas si tranquille que ça. De quoi inquiéter les oenotouristes et les gentils organisateurs qui fleurissent depuis peu dans toutes les régions viticoles.
Mais ce qui me dépasse, par-dessus tout, c’est l’annonce ce même mois du dépassement des 3 millions de chômeurs. Paradoxale atmosphère. A douter de la souffrance et de la précarité des assurés sociaux sans emploi dans notre si petit pays !
Un french paradox de plus 🙂