Allegria des vins de tribu d’Aboville

Tribu d'A

Pour être moderne, en accord avec l’évolution du monde, le vignoble doit accueillir des projets innovants et accepter sur son sol des initiatives tangibles.

Allegria en est un symbole vivace !

Union franco-argentine affirmée de deux familles, les d’Aboville et les de la Mota, cette aventure a vu le jour en 2007, entre Neffiès er Caux, sur 9 ha de parcelles superbement situées, véritables porte d’entrée d’une vallée de vigne faisant face à la méditerranée. L’activité volcanique de la région a fortement marqué le terroir, lui a donné ses formes ondulées et enrichi le sol de diversité propice à l’élaboration de vins atypiques.

L’ambition tient au fait de vouloir construire des bâtiments respectueux de l’environnement, au maximum autonome en énergie, fondus dans le paysage sous un couvert végétal, et parfaitement adaptés pour recevoir in situ les amateurs de grands vins.

Les d’Aboville ont l’idée d’ancrer leur tribu, 4 enfants, dans les racines profondes du vignoble. Leur générosité naturelle s’exprime déjà dans leurs premiers vins.

La cuvée Tribu d’A rouge 2008 diffuse en vous une intensité surprenante d’arômes sudistes. Ce vin a de la franchise et porte l’étendard d’une appellation récente, poussé par la fougue et l’énergie de ces personnes dont les obstacles sont des appels à la réussite.

Le blanc assemble 2 cépages, marsanne et roussanne, selon 2 vinifications différentes, le premier en cuve et le deuxième en barrique, pour une exaltation d’équilibre, un défi de fraîcheur.Vous retrouverez ses coordonnées et un peu plus sur le blog de Vino Tinto

Le vignoble s’arrache à sa terre et oublie son histoire

Finalement, ce qui m’énerve ce n’est pas tellement de savoir qui a raison si le vin bio existe ou pas.

Non ! ce qui m’exaspère c’est la perte de sens dans ce quotidien et l’oubli de notre vignoble :

raisin-rougeTiens en exemple, pendant une anodine réunion annuelle d’association sportive dans mon village de l’hérault, au cœur de cette immense vignoble, dont la terre respire encore de la culture millénaire de la vigne.

La convivialité du moment s’accompagne comme toujours et partout d’un apéritif, léger grignotage, assortiments de jus de fruit, de soda simili cola coca, et de plusieurs bouteilles de vins, blanc et rouge.

Bien évidemment, celui qui choisit les vins se fend toujours d’un « alors, qu’est-ce que vous en pensez ? Il est pas mal ce blanc de la cave coopérative ? »

Sur la table… le résultat de ceux qui oublient leur identité et leur histoire : Un sauvignon blanc et un chardonnay.

« Ca vient de la coopérative ! Ils en ont bien du mal à vivre et à vendre leurs vins, pourtant, il n’est pas mauvais, hein ?! »
Qu’est-ce que l’on peut dire pour ne pas fâcher ? Alors, on passe pour le renfrogné de service, jamais content !

« Mais vous savez que le chardonnay et le sauvignon ne sont pas des cépages du Languedoc. Que les gars ils font ça parce qu’on leur a dit que dans le monde, le consommateur ne boit que du chardonnay et du sauvignon. Alors ils ont arraché, beaucoup, et continuent de le faire, leurs cépages d’origines, leur identité, je vous dit, comme la marsanne, la roussanne, la clairette, le grenache. »

Et après ils s’étonnent que l’hémisphère sud soit capable de faire les mêmes vins mais pour moins chers ? Et ce sont les mêmes qui pleurent parce que dans les vieux villages, plus personnes ne boit de leur vin, plus personne ne fête la vigne, la machine a remplacé les bras !

Et dans ces mêmes villages, les néo-habitants qui viennent graviter autour, dans des lotissements décharnés, pour y construire des villas mal isolées, chauffées et refroidies à la clim, et des piscines pas plus grandes que le terrain qui en fait le tour, ces gens-là vont à la fête du village parce que c’est la fête de l’école des petits et quand ils ont besoin de vins, il y a tout ce qu’il faut dans le hard-discount du coin. Ils ne participent plus de la vie du village qui se meurt en son centre.

Quand on vous dit que le vin ce n’est pas qu’une boisson, c’est aussi une culture et une histoire. En voilà un bel exemple. Le lien entre la terre, la vigne, le vigneron ou la cave coopérative et l’habitant a bel et bien disparu.

Alors oui, on passe encore pour des grincheux quand on rappelle à ses concitoyens que le vrai vin c’est celui d’un vigneron qui respecte son histoire, sa vigne et celui avec qui il le partage. Faites l’effort de la rencontre, vous y gagnerez.

Domaine de Saumarez, des anglais en Languedoc

liz and robin williamson saumarez murviel montpellier

La finance mène à tout !De Londres à Montpellier, à Murviel plus précisément, avec un sacré projet de vie. Passer de la vie trépidante du marché bancaire, rivé à son écran d’ordinateur, au noble métier de vigneron languedocien.Bien évidemment, rien ne se fait facilement et si la décision se prend en toute liberté, l’espace qu’elle dégage entraîne celui qui la prend dans un profond bouleversement du quotidien.

L’avantage d’être anglais dans pareille situation ? Le flegme ! Le sens de l’humour ! Liz et Robin en regorgent, fiers de produire des vins qui se remarquent de plus en plus dans ce petit monde du vin.Sur leurs 11 ha de vignes, ils ont réussi à redonner un bel équilibre à la nature, en bannissant les produits phytosanitaires pour mieux aller chercher l’authenticité du terroir.

Aujourd’hui, vous trouverez au domaine, sous un joli accent britannique, des vins subtils comme ce blanc réunissant les 3 cépages du Languedoc, Grenache, Marsanne, Roussanne, sur des tonalités minérales et agrumes.En cave, l’équipement fait preuve d’une recherche de qualité en optimisant au maximum l’espace. Vous ne trouverez pas un alignement soigné de cuves inox rutilantes mais des cuves béton aussi efficaces que les barriques d’occasion utilisées pour l’élevage des vins.Liz et Robin WilliamsonDomaine de Saumarez34570 Murviel-les-Montpellier

L’originel de Cahors, c’est du vin naturel par Simon Busser

simon busser originel cahors Prayssac

J’ai rencontré Simon sur un salon convivial cet été, en pleine chaleur. Il avait une barbe de plusieurs mois, au moins, qui tombait sur sa poitrine. Pour vous dire à quel point nous étions loin des ambiances distinguées et feutrées des salons parisiens, simon était tout simplement torse nu ! Le naturel c’est ça. Ca peut surprendre, je le comprend !Et comme Simon n’est pas du tout cadre commercial dans le civil, il n’a fait aucun autre effort de présentation. Pas de PLV sur son mini stand qui se résumait à un tonneau et un parasol. Donc à part ce grand gaillard campé sur un physique à faire craquer pas mal de consommatrices averties, ces chères femmes amatrices de vins qui nous sauverons tous de la surproduction, seule son unique cuvée trônait et attirait l’oeil.

simon busser et sa jument

Sous ce soleil, le vin était imbuvable et il ne me resta que l’option d’emporter un échantillon chez moi pour le déguster plus tard, au frais. Alors cette cuvée l’originel ouverte il y a une semaine est réellement une découverte. Un fruit incroyable en bouche avec un velouté de tanin assez fin et une belle longueur. Le vin est noir, fidèle au Cahors mais sans aucun marquage de bois, sans lourdeur en alcool. Je le précise pour tous ceux qui pensent, même les professionnels, que la barrique sert à apporter des arômes de vanille et de toast au vin ! car cette cuvée est bien élevée 10 mois en fût de chêne.Ce vin vous fera comprendre la maîtrise de l’homme sur la conduite de la vigne, que Simon, certainement pas par snobisme ou par mode, travaille avec une très belle jument. Vous reconnaitrez ses bouteilles en suivant cette étiquette :

L'originel - Cahors

Les Fusionels : le vin par amour en AOC Faugères

arielle jem harris demets les fusionnels aoc faugères languedoc

Savez-vous que le vin assemble aussi bien les cépages que les cultures, les genres et les deux visages du monde.
Prenez par exemple une belle champenoise qui s’en va en Australie, armée tout autant de ses diplômes en œnologie à Beaune qu’en commerce international à Paris, et faites-lui rencontrer un jeune vigneron dans les vastes paysages de vignes. Ensemble, ils vont chercher le meilleur endroit pour réaliser leur rêve et trouveront ce paradis, ici, en Languedoc, sur le réputé terroir de Faugères. Ils leur faudra attendre pas moins d’un an et demi avant de trouver les parcelles idéales, en altitude, sur un sol couvert de schistes.
Puis ils décident de nommer leur aventure et leur domaine : Les Fusionels, choisissent un emblème bien à eux : une statue symbolisant l’union de leur passion commune et se lancent aussitôt dans leurs premières cuvées.
Premier essai transformé avec deux médailles au concours des grands vins du Languedoc-Roussillon : le bronze avec la cuvée le rêve, un pur grenache velouté et fruité, et l’or avec la cuvée les intemporelles. L’aventure se poursuit par la construction d’un chai de 1300 m² sur deux étages à Cabrerolles, sur le sommet de l’appellation Faugères, entaillant une partie de la roche. Ainsi, bien à l’abri, les vendanges seront traitées par gravité et une grande salle de dégustation avec vue sur le vignoble et jusqu’à la mer et les Pyrénées devrait magnifier les vins.
Saviez-vous qu’il existe encore et toujours, sur ce vignoble du Languedoc, que beaucoup s’acharne à déraciner, des âmes passionnées bien décidées à relever le défi de la mondialisation. S’il ne fait aucun doute que Les fusionnels vont se faire une belle place au soleil, ne perdez pas l’occasion d’être séduit en dégustant leurs prochaines cuvées. Sachez, vous aussi, tourner avec ce nouveau monde du vin.
Arielle et Jem Harris
Les Fusionels
AOC Faugères
www.les-fusionelsfaugeres.com

Defaix Daniel-Etienne : du chablis tout cru

daniel etienne defaix chablis vinexpoDaniel-Etienne Defaix dilue de la tendresse autour de lui et dans ses vins. La voix de l’homme apaise. Son regard rassure. Les mots qu’il emploie donnent à la rencontre un sentiment agréable de bien-être et d’humanité. Je suis en confiance et dans ces cas-là, on espère sensiblement lui en donner, un peu, en retour.

Accompagné de Laurent Baraou, de bû, je découvre ce faiseur de « petites grenouilles« , des têtards de grand cru, aux mains pleines de bouteilles, toujours à faire gouter de ses vins de Chardonnay. Il va jusqu’à nous servir un Chablis premier cru Vaillon 1983. C’est un peu de sa terre que l’on met en bouche en s’attendrissant d’une telle complexité.
On devine ce soin apporté à la fermentation en préservant les levures indigènes et ce long travail de bâtonnage des lies fines qui pendant 18 mois enrichi le vin.

La crise durant, le chablis souffre, Daniel-Etienne tout autant. Et pourtant, il résiste, ne licencie personne, s’accroche. Son dynamisme se remarque : logo soigné, une symbolique claire, porte ouverte, un nom, un homme, un terroir, des vins d’exceptions. Mais voilà, la France boit moins. Les grands hôtels et les bons restaurants ne commandent plus et se délestent un peu de leur stock. Ca fait rentrer de la trésorerie.

defaix baraou lebaron vinexpo bordeaux

Daniel-Etienne a le sens de l’accueil à Chablis. Alors, outre son domaine, vous y trouverez un restaurant/Bar à vin, la « Cuisine au vin » (difficile de faire plus explicite !), et un hôtel de 38 chambres : Aux lys de Chablis…le Lys étant le nom d’un des terroirs de l’appellation. Bel exercice de style, vouloir tout nous donner, le pain, le vin et le couvert, en un même lieu, une même scène… Cet homme veut nous faire plaisir et il tient à ce que l’on revienne dans son village de Chablis, découvrir tous les secrêts de sa carte. En repartant, faites un détour par le village d’Irancy, et faites le plein de rouge cette fois-ci, pour ne froisser personne.

 

daniel etienne defaix chablis vinexpo bordeaux

Vous trouverez facilement le restaurant dans le village de Chablis et si vous n’êtes pas trop loin de ce fameux repère de bû, rendez-vous chez Laurent Baraou, il en a pris plusieurs bouteilles pour les amis de passage.

Domaine Jorel, AOC Maury : vin nature en terre cathare

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Manuel-Franck Jorel parle du concept d’extensivité et nous explique sa différence dans l’approche de la vigne : « Moi, je travaille en culture extensive, c’est à dire que je recherche le plus faible rendement : 15 hectolitre/ha. De ce fait, je n’utilise aucun produit chimique et j’essaye d’intervenir le moins possible dans mes vignes. Mais c’est limite. Il faut faire attention parce qu’avec ce sol de pierres, de schistes, le peu d’herbe qui pousse ne doit pas faire trop de concurrence. » Alors même si ses coteaux sont assez pentus et raides, il doit labourer entre les rangs. « L’idéal ce serait de le faire avec une mule. C’est l’animal le plus adapté pour ce que je veux faire. Le cheval serait trop puissant et c’est beaucoup plus compliqué à manœuvrer. »

vigne_jorel_maury_aoc_grenacheDu haut de ses parcelles, en pleine garrigue, Monsieur Jorel aime raconter son terroir, celui de Maury, superbe AOC située sur l’ancienne frontière entre l’Occitanie et la catalogne, à l’endroit même où les plaques africaine et européenne se sont chevauchées, il y a plus de 100 Millions d’années. Cela explique une telle variété de sol, dans cette cuvette, avec principalement du schiste, signe d’une friction de la terre, du granite plus au sud sur les hauteurs et du calcaire en coulée, plus au nord, au pied du célèbre château de Quéribus.

Le vignoble de Maury présente l’avantage d’avoir su reproduire ses grenaches le plus possible par sélection massale, c’est à dire cave_jorel_maury_aoc_futgreffés sur place, et non pas par plantation de clones. C’est technique peut-être mais sachez que c’est un atout majeur pour garantir l’authenticité de ce terroir que beaucoup leur envie. A Saint-Paul-de-Fenouillet, dans la cave du domaine, il faudrait presque être en tenue de spéléologue pour entrer dans la partie la plus basse, sous la maison, sous le village, revenir en 1620 dans les anciens souterrains menant au chapître de l’Abbaye. Là, se repose religieusement quelques fûts, noircis par l’humidité. Rien à voir avec les chais modernes où s’ennuient des légions de barriques neuves, toutes propres et aseptisées. Les vins sont élaborés sans intrants, avec les levures du raisin et un minimum de sulfites.

Outre un délicieux vin doux naturel en Maury AOC, j’ai adoré son Pétaillat, un 100% Grenache noir à mettre sous clés.

pétaillat 2005 jorel

Soirée Oeno-blog à la Brasserie Bordelaise : Du chateau Tire pé à Olivier Dauga

Un peu de publicité parce que j’ai adoré cet endroit, l’accueil, le repas et les vins. La Brasserie Bordelaise se situe dans une rue piétonne, au 50 rue Saint Rémi,  près de la rue Sainte Catherine et du théatre. Si vous êtes de passage ou bordelais, n’hésitez pas, réservez à l’avance. Une immense table en bois dans la cave voutée donne le ton et l’ambiance, pour une soirée d’échanges et de rencontres à plusieurs. Soit vous restez vissé à votre banc et ne parlez qu’avec vos proches voisins, soit, n’y tenant plus, vous voyagez autour de la table, par étapes. C’est au choix.

 

cave voutée brasserie bordelaise à bordeaux rue saint rémi

C’est notre deuxième soirée entre gens de blog de vin, toujours suivant l’invitation du CIVB, et l’opération de séduction va fonctionner à fond. D’abord le lieu est magique et nous invite à prendre nos aises comme notre temps. Ensuite, nous sommes accompagnés de la responsable du marketing Europe du CIVB, Carole Demolis, sagement prise en main par le plus gentleman de nous tous, Laurent.

Laurent baraou carole demolis marketing civb bordeaux

Puis, nous avons la chance de rencontrer et d’avoir enfin du temps pour discuter et faire la connaissance de quelques vignerons et de leurs vins. J’ai pour voisin, Olivier Dauga, célèbre « Faiseur de vin« , imposant, plutôt costaud mais très chaleureux et rapidement disert sur les différents domaines qu’il conseille. Ses airs et son allure se démarquent de l’image traditionnelle du Bordeaux, revue plus tôt, dans l’après-midi, durant la dégustation des grands crus. L’homme est un original, ça me plait. Il se prénomme olivier, on est deux. Il me parle d’un domaine, le Chateau Grand Boise, dans les Bouches du Rhône, à Trets, et comme par hasard c’est un village que je fréquente avec amour depuis fort longtemps. Un bel endroit entre le massif de la Sainte-Baume et la Montagne Sainte-Victoire, où vous trouverez à l’endroit du chateau, une très belle vinothèque. (Sur la photo, en-dessous, olivier Dauga c’est le jeune homme à gauche avec son écharpe verte à paillettes. L’homme a du style. A droite, mon verre et mes verres…)

olivier dauga bordeaux faiseur de vin

Olivier Dauga fait des vins uniques qui exaltent avec franchise le plaisir, à travers le fruité généreux d’un raisin idéalement mûr au boisé fondu, associé à une étiquette moderne dans un monde où la consommation des vins est en pleine mutation.  Nous avons le même credo : Il y a un nouveau monde du vin !!!

La table se couvre, petit à petit, de bouteilles, pas toujours vides, tant on nous propose des cuvées différentes à déguster. J’amoncelle devant moi, avec la complicité de la serveuse, très affable, faisant preuve d’une pointe d’espièglerie professionnelle qui anime l’envers d’une soirée,  celles que j’ai préférées et qu’il me plait de noter des détails à partir de l’étiquette et d’y revenir de temps en temps par plaisir.

Le coup de coeur arrive enfin avec les vins du Château Tire Pé de David Barrault. Il a tout de ses vignerons qui travaillent par passion, les pieds dedans et les mains bien occupées. Celui-ci travaille dehors, au grand air, et cultive pas moins de 13 ha sur le terroir de l’Entre-Deux-Mers. Je suis charmé par les premières effluves de sa cuvée Malbec et très vite par la finesse et le fruité en bouche. C’est un vrai régal qui vient à point nommé sur le dessert. Il nous raconte que le nom du Château vient de la montée pour y parvenir. Les bêtes, et pourquoi pas les hommes aussi, en produisant un effort, y tirent un pet. C’est moins poétique que l’Angélus, n’est-ce pas ! David n’est pas forcément très à l’aise devant nous tous mais il nous touche par sa sincérité et son vin n’en finit pas de tourner sous mes narines. Je m’en abreuve doucement, tandis que la soirée s’achève. Il est 2 heures. Bordeaux bruisse encore de monde dans ses rues éclairées. Nous irons, pour certains d’entre nous, trainer une bonne heure de plus, pour parler encore.
Ce monde du vin me plait. Même ici, sur cette terre de Bordeaux, un frémissement se fait voir et des hommes tels qu’olivier Dauga et david Barrault feront école, c’est certain.  Un coup de chateau au CIVB pour l’essai transformé.

Domaine Turner Pageot : producteur de vin bio en biodynamie à Gabian en Languedoc

Turner Pageot, un nom qui sonne bien, un peu anglo-saxon, genre vieille bagnole ou constructeur d’avion dans les années 50. A Gabian, dans ce petit village de mélange d’âmes, construit en circulade, assemblage idéal de rues pour bien tourner en rond et capter le touriste de passage, les Turner-Pageot ont élu domicile et cave. L’un avec l’autre, la maison pour y accueillir la famille grandissante, la cave pour y faire naître un projet commun : avoir son propre vignoble, ses vins bien à soi. Turner c’est le nom de Karen, œnologue Australienne, mariée à Pageot Emmanuel, alsacien de cœur. Après 10 bonnes années à « circulader » autour du monde, tantôt dans un domaine en Afrique du Sud, tantôt en Toscane, poussés par les opportunités qu’offre ce fabuleux monde du vin, les voilà maintenant solidement attachés à la terre du Languedoc.

En partie en créant un GFA, ils ont choisi minutieusement les parcelles, une à une, plutôt vieilles, privilégiant l’exposition Nord, Nord-Ouest sur un sol argilo-calcaire. Seule, une parcelle de grenache se retrouve plein sud sur un sol de schiste. Déjà, à cette étape, ils sélectionnent les vignes en fonction du vin qu’ils désirent créer : « des vins digestes, raconte Emmanuel, avec de l’amertume et de l’acidité ».

verjsu jus de raisin vert préparation culinaire

Dans la cave, nette, précise, des bouteilles contenant un liquide orange, se soutiennent, en rangs serrés, près du matériel en inox. Le mystère s’épaissit quand Emmanuel nous avoue que ce n’est pas du vin, mais qu’il s’agit de verjus !
Verjus : jus vert réalisé avec les raisins encore verts que l’on ramasse en Juillet, juste au début de la véraison du fruit, afin de concentrer la plante sur les grappes que l’on laisse sur pieds. Comme les raisins cueillis ne sont pas murs, le jus obtenu n’est pas sucré , juste un peu acide et sans alcool. Il se trouve que c’est un substitut très original pour réaliser des préparations culinaires comme des sauces, des vinaigrettes, des marinades. Selon Emmanuel, le verjus est fort réputé à l’étranger comme étant un produit spécifique de la France et de sa gastronomie. Il faudra donc, si vous êtes comme moi, nez au vent ou néophyte à nos heures, redécouvrir ce produit. Mes premiers essais en préparant, un peu à l’aveuglette, du colin (Maillard), sur un lit de tomates cerises, de cebettes et de petites grenailles, fût très apprécié.

emmanuel pageot domaine turner pageot gabian vigneron

L’autre petite bizarrerie, que j’aime à dénicher, se trouve tout au fond du jardin, derrière un mur, en passant une porte à clairvoie, dans de grands tonneaux. Adeptes du vin en Bio-dynamie, ce qui ne veut pas dire « vigneron extra-terrestre aux propos délirants », je le rappelle pour ceux qui ont toujours envie de croire que la différence de pensée s’apparente à de la magie, ils cultivent plusieurs sortes de bouillie comme des infusions d’orties et de prèles pour apporter de la vigueur à la plante au printemps, ou encore des jus d’oignon et d’ail, véritable insecticide naturel. Il faut, tout de même, pas moins de 50 kg de plantes fraîches pour 300 l d’eau. Le tout sera pulvérisé dans la vigne. Quand il le fait avec des huiles essentielles de romarin et de lavandin, il doit venir comme une bonne odeur de garrigue au nez des villageois. Par contre, je ne vous conseille pas le jus d’ortie. Saturée en potassium, en fer et en azote, l’odeur vous rappelle très nerveusement les fortes effluves d’une étable.

Mais alors le vin, dans tout ça, comment est-il ? Certifié en première année de conversion en agriculture biologique par ecocert et en bio-dynamie par demeter. Passés les formalités administratives, Emmanuel nous propose d’abord un rosé d’assemblage, avec du grenache, en saigné, et de la syrah, pressée. Très coloré, très peu soufré, c’est un entrée gamme bien épicé, à déguster sur des plats de poissons.
Ensuite, vient le moment de La Rupture, cuvée en vin de pays de l’Hérault, sublime sauvignon blanc, élevé en barrique, neuve et de quelques vins. La petite astuce alsacienne du domaine c’est de le fermenter à chaud, en plongeant une canne dans les fûts, quelques heures. Les arômes variétaux, très typés du cépage, vont être atténués. « Ca sauvignonne moins » aime à dire Emmanuel « c’est plus minéral, plus rond comme ça ».
Les rouges ne sont pas encore en bouteille mais la dégustation au pied des cuves et des tonneaux se révèle très agréable, et surprenante pour le grenache notamment.

Anthony Tortul La Sorga
Les étiquettes de vin de La Sorga d’Anthony Tortul : concept marketing ou besoin de se dé-marque-r

J’ai déjà, ici même(), raconté et exposé quelques fous des étiquettes de vin, des originaux comme Alonso qui s’efforcent de nous désacraliser la vinasse en jouant sur son contenant. J’en ai trouvé un autre, en pleine création, au tout début de son aventure et j’ai eu comme un aperçu de mon paradis. Le bonheur du dégustateur fouineur de vins nature.

Anthony Tortul La Sorga Négociant Vinificateur

Anthony Tortul s’est lancé (en  pleine crise ?) dans le négoce et la vinification de vins naturels. Incroyable démarche, au coeur des multiples terroirs du Languedoc, de la part de cet « oeno » après avoir appris et compris, ailleurs en France, que faire du vin était une question d’identité, fondamentale pour son épanouissement. Alors la crise on l’affronte en prenant un risque et en prenant son pied. Il a sélectionné pas moins de 15 vignerons en Bio, de Limoux à ChateauNeuf-du-Pape, en passant par Pézenas, Faugères, Saint-Chinian et Carcassonne.

cave barrique la sorga

Au total, cet équilibré, car on peut être fou sans être déséquilibré, vinifie 29 cuvées dans une seule cave, la plupart en fût de chêne pour exploiter au maximum la diversité des terroirs et cépages qu’il a vendangé en, tenez-vous bien,  36 jours, de Septembre à Décembre 2008 !!!  Il devait être dans un drôle d’état à Noël !
Et voilà qu’à la dégustation de ses blancs, mes bras m’en tombent, que du bon, que du nature, pas de soufre ou très peu, aucun intrants, du pur jus de fruit, pressé en douceur, en prenant son temps. Une barrique de Chasan par-çi, une autre de Mozac, du Muscat plus loin, et du Sauvignon…une vraie caverne d’ali bibi ! A chaque nouveau verre, une nouvelle rencontre avec un terroir d’exception. Que c’est beau le Languedoc comme cela !
Pas un seul soupçon d’oxydation, de la finesse, des arômes d’agrumes, de la brioche, un fond de toast, de la cannelle…un voyage fantastique des saveurs.

Anthony ne s’arrête pas là. Il a donc élaboré 29 étiquettes pour ses 29 cuvées ! Ce travail qu’il a fait en un an, c’est hallucinant ! Et puis 29 noms pour identifier ses créations et nous transmettre ce bouillonnement qui devait s’accumuler dans son esprit depuis fort longtemps. Chaque nom est un appel, un cri, une envie, un peu de lui, une extraction de son savoir-faire :
French Wine is not dead, L’Hérétique, Le Désordre, Chat Zen, C’est pas très Catholique, Le Pitchoun, Prends le gauche, Ah!!! Ramon, Pomponette, En rouge et noir, Premiers pas, Caillasse…

étiquettes vin la sorga

Cet homme vient de bousculer tout un ancien monde, par ici, et croyez-moi, vous en entendrez parler. Un phénomène rare ! Et puis, j’ai adoré aussi ses couleurs, dans l’entrée de sa cave, du fushia, du vert pomme, et la vie en lui qui rayonne et donne envie de partager son aventure !

Vous retrouverez les vins de La Sorga à partir de 6 €, la quasi totalité en Vin de Table par commodité administrative !