Pierre Frick : Du Naturel de l’homme comme du vin

Un message de Pierre Frick, réputé pour ses vins en bio-dynamie en Alsace. Nous ne sommes pas seuls à vouloir partager. J’ai repris sa plume en intégralité :

LES  VENDANGES  2008  SONT  ACHEVEES…

17 novembre… les derniers raisins ont été récoltés par un bel été indien il y a à peine 5 jours, des Riesling rosis par l’alternance du soleil et de quelques averses d’arrière saison. Avec 13 % potentiel et l’entrée dans une cave où la tempête fermentaire de la période centrale des vendanges s’est calmée depuis quelques temps, ce jus récolté très froid est réchauffé un peu pour dynamiser les levures indigènes, qui s’abandonneraient sinon à une léthargie hivernale. Ce Riesling du terroir Morgenbrunn ( fontaine du levant) clôture les belles vendanges 2008. Le mois d’octobre, béni des dieux, a transformé cette année l’essai un peu manqué des mois août et septembre, trop frais et ombragés. Dans nos parcelles un grand tournant de maturité (brunissement des pépins, fluidité de la chair des grains de raisins) s’est opéré vers le 10 octobre et le cœur des vendanges s’est donc déplacé au 18 octobre. Patience et confiance, après le dur travail de la saison estivale. La précipitation laisserait un goût d’insatisfaction et d’inachèvement. Au contraire, nous avons attendu chaque parcelle, et d’ailleurs nos petites capacités de pressurage nous enlèveraient toute tentation de bâcler cette période cruciale de la cueillette des raisins.
18 coupeurs et 2 porteurs de hotte égaient les vignes pendant 4 semaines,  en triant souvent au pied de vigne avec deux seaux. Le brassage des origines et des générations, le travail partagé et les déjeuners pris ensemble au milieu des vignes tissent un vécu culturel essentiel pour nous . Pourtant la rencontre de vendangeurs devient rare  dans le vignoble, avec la suprématie croissante de la machine à vendanger. Eh oui, 550 euros de coût de récolte à l’hectare en récolte mécanique, alors que la cueillette manuelle s’évalue à 2200 euros par hectare. Si la production de vins n’est qu’un gagne-pain, le calcul économique  laisse bien sûr peu de chance à la vendange manuelle. Ajoutez à cela que la motivation pour la cueillette manuelle n’est plus si répandue par les temps qui courent. Alors ?… Nous continuerons à faire toucher et cueillir nos raisins par des mains humaines, dans une ambiance gaie et chaleureuse. Cela aussi le vin le porte en lui, pour faire du bien au dégustateur.
Nous sommes des artisans-vignerons, et cette petite communication, nous l’écrivons entre deux nettoyages de foudres, après des soutirages, et avant de reprendre les densités des jus en fermentation. Ce sont des journées cruciales où il faut déguster journellement les cuvées et prendre des décisions rapides. Lorsque la fermentation d’un vin ralentit, la question se pose de l’équilibre final entre alcool, fraîcheur et sucre résiduel. Faut-il le préparer à passer l’hiver et à reprendre la fermentation au printemps ou l’été suivant. Ou bien l’équilibre  est-il satisfaisant pour l’avenir du vin, auquel cas le soutirage s’impose. Si un goût de lies apparaît dans une cuvée, est-il acceptable durant quelques jours, ou bien faut-il aérer le vin au risque de le fatiguer. L’un ou l’autre de ces choix se pose pour les 30 cuvées récoltées en 2008. Ce sont des « petits enfants » à surveiller, parce que les erreurs de jugement dans cette phase ne se réparent pas, lorsqu’on renonce à toutes les corrections et tous les additifs mis à disposition par la pharmacopée oenologique. Si nous prenons la mauvaise décision, il faudra faire avec. C’est un travail de funambule sans filet.
Le millésime 2008 a confié à notre surveillance des cuvées aux rythmes très divers. Beaucoup d’entre elles ont achevé leur première phase avant l’élevage.  En revanche les derniers jus récoltés cherchent encore leur orientation. Certaines cuvées ont eu une fermentation au pas de course, menée  jusqu’aux derniers grammes de sucre : Sylvaner classique, avec sa fraîcheur bien mûre et sa bouche finement herbacée – Chasselas souple et effervescent – Muscat classique, pressenti pour un élevage sans soufre – Riesling Bihl tranchant et minéral – Riesling Krottenfues aux  saveurs de noix de coco.
D’autres cuvées, aux jus plus concentrés, ont suspendu leur course avec un peu de douceur en fin de bouche : environ 10 g de sucre résiduel :   Pinot Auxerrois Krottenfuess au palais encore resserré, Pinot Blanc Hohlweg très fragile à l’aération, Riesling Rot Murlé encore troublé par les lies. Plusieurs vins riches touchent à leur aboutissement avec une finale qui restera moelleuse : Pinot Gris Rot Murlé en recherche de finesse,  Gewurztraminer Morgenbrunn au palais fin de fruits exotiques – Sylvaner Bergweingarten exubérant au nez et au palais – Riesling Grand Cru Vorbourg  au palais encore épais.

 

Les Pinot Noirs ont été récoltés bien mûrs par tri, égrappés à 60 ou  70 % et encuvés 10 jours pour la macération. Le Pinot Noir classique, souple et frais, sera peut-être élevé sans soufre – le Pinot Noir Strangenberg se trouble et demande le soutirage – le Pinot Noir Rot Murlé, déjà soutiré, exhale la cerise et l’encens – le Pinot Noir Terrasses, soutiré également,  reste sur la réserve comme un vin de garde. Le millésime 2008 a offert également une belle moisson de Vendanges Tardives et Sélections de Grains Nobles, grâce à un  travail de tri à la vigne. Elles arrivent peu à peu au bout de leur long périple fermentaire : Muscat et Gewurztraminer Grand Cru Steinert,  Gewurztraminer Grand Cru Eichberg, Pinot Gris Grand Cru Vorbourg, Gewurztraminer Sélection de Grains Nobles (22 % potentiels) et  Pinot Gris Sélection de Grains Nobles (19 % potentiels). Cette récolte est une  chance renouvelée d’accompagner la naissance de jeunes vins. Chacun d’eux représente une  œuvre d’art unique. Ceci les différencie des vins figés et reproductibles, « fabriqués » et arrangés avec les artifices œnologiques. Nos vins  de 2008 seront porteurs  de messages particuliers pour le dégustateur, s’il sait écouter ses sens et s’ouvrir aux énergies subtiles.  

Chantal et Jean-Pierre Frick

DERAIN : Son avis sur son appellation Bourgogne

Monsieur Derain Dominique m’a confié quelques unes de ses réflexions suite à la mésaventure subie, cet été, lors du rejet de sa cuvée 2007, pour l’agrément en appellation Bourgogne rouge.
En effet, comme le système d’AOC ne fonctionne plus comme il avait été prévu, certaines réformes sont en cours et plusieurs surprises sont apparues un peu partout dans lesinao logo vignobles, notamment à l’encontre de ses vignerons au naturel.
Soyons brefs : Un examen organoleptique juge si le vin correspond ou non à la typicité de l’AOC à laquelle il prétend appartenir.  Comme on veut resserrer les rangs et redonner une identité forte à chaque AOC, ceux qui s’écartent de la norme, par originalité, par goût, par des pratiques différentes, ceux-là seront certainement à chaque examen soumis à un tranchant de langue, un fil de nez, un retrait temporaire avant le définitif !!!

Dominique derainMonsieur Derain y a eu droit au mois d’Août !
Motif : Le vin était « évolué, oxydé, astringence » !!!
Sanction Encourue : « Retrait temporaire du bénéfice de l’
AOC »
Finalement, un deuxième examen lui a accordé l’AOC. C’était un jour meilleur, très certainement !

Voilà sa lettre ouverte : 

LE VIN : du savoir-faire à l’arbitraire ou secousse de 20 sur les chais des riches terres…

Nous sommes des paysans qui par la connaissance et l’expérience de nos pères et grands pères arrivent sur les rivages du monde. Nous avons laissé nos vaches, nos poules, notre cochon et nos céréales pour nous consacrer uniquement à la culture de la vigne.
Le vin qui nous abreuvait hier est maintenant vendu dans le monde entier. Son originalité en fait un produit toujours exceptionnel et très atypique, ce qui a éveillé et éveille encore la curiosité hors de nos frontières. Cet esprit même de plaisir reste notre force que la vigne puise dans nos finages, sur les pentes de nos coteaux au climat si particulier.
C’est cette subtile alchimie qui différencie le vin d’autres produits agricoles. C’est dans cette attitude que nous réussissons à donner le goût de l’aventure aux professionnels du vin ainsi qu’aux néophytes. Aujourd’hui, gardons bien cela en mémoire pour agir dans la compréhension des mystères du vin.
Le marketing n’est qu’une finalité de notre travail et non le début. Préservons les différences, les nuances, la pureté. Que voulons-nous d’autre ? Que cherchons-nous à vouloir couper la branche sur laquelle nous sommes ?
Aujourd’hui le droit de vendre son vin est décidé de façon arbitraire par un « tribunal » qui n’a aucune compétence scientifique sérieuse mais un pouvoir sans limites de vie ou de mort sur ses voisins ! De nombreuses expériences passées prouvent l’irrationnel d’un tel système.
La confiance est une invitation à la vie, ne partons pas sur des vins stériles et linéaires. Tout le monde peut réaliser ce genre de produit avec excellence et les exemples ne manquent pas. On nous demande d’être des techniciens, des chimistes, des VRP, des businessmans. Il sera un jour décidé que le vin doit être bleu et il devra l’être ; peut-être pourrons-nous jouer sur l’intensité du bleu ! C’est l’art et l’imagination qui font évoluer les choses, pas les lois de marché et les marchands de produits miracles.
De nombreux vignerons s’interrogent et baissent les bras devant l’érosion des valeurs. La pensée unique qui passe par un seul faisceau est à l’origine d’un mot que je ne peux écrire ici  et qui correspond à l’organisation du monde agricole actuel.   Ces mêmes vignerons vivent du fruit de leur travail, ils portent loin dans le monde la reconnaissance et le respect de leurs compétences, il ne faut pas l’oublier pour apporter une pensée objective sur l’avenir de cette profession.
Nos valeurs sont devenues obsolètes et nous vivons aujourd’hui avec une épée au dessus de la tête, il faut vraiment être joueur ou fou pour accepter cela !   A qui profite le séisme de nos appellations ?

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Bordeaux fête le vin de Bordeaux !

Bordeaux fête le vin logo

Bordeaux fête le vin / gilles arroyo

Et pendant que le Languedoc se remet d’une manifestation dérapante, Bordeaux vous fait plaisir en vous faisant déguster ses crus et en dorant, un peu plus, son image. A ce qu’il parait, ils ne connaissent pas la crise…en tous les cas, ils vont vers l’avant, sachant que l’important pour vivre de la vigne, c’est de vendre son vin. Plus son image est valorisée et plus on le vendra aux meilleurs prix.

Comme l’a dit Olivier Rives, directeur de la Fédération régionale des coopératives agricoles du Languedoc pendant les dernières manifestations des viticulteurs à Montpellier : »On paie très cher l’absence totale depuis vingt ans d’investissements sur le marketing, la promotion, les forces de vente. On a mis le paquet dans le vignoble et la cuverie. Maintenant, on a des bons produits mais on ne sait pas les vendre ! »
Bel aveu d’impuissance que l’on aimerait résoudre, avec ardeur, Messieurs ! Si je peux vous aider, vous conseiller, n’hésitez pas, contactez-moi directement : blog@showviniste.fr. Vous savez, nous sommes quelques uns, implantés notamment dans la région, formés au marketing de la filière vin. Si vous ne connaissez pas, il y a par exemple le Master Commerce des Vins de Montpellier .

En attendant, venez fêter le vin à Bordeaux, 4 jours de festivités du 26 au 29 Juin 2008 le long des quais sublimement restaurés et où flâner prends désormais tout son sens. Il est fini le temps où il y avait 8 voies pour les voitures. Les façades ont perdu leur noir habit de pollution, des plantes courent aux côtés des rails du tramway. La vue sur le fleuve est idéale. La mairie a mis les moyens, elle aussi sur le marketing, confortant cette renommée mondiale sur le seul nom de Bordeaux.
Pour une meilleure idée de ce qui vous attend : Bordeaux Fête le Vin

Bordeaux fête le vin

Bordeaux Fete le Vin 2008 / jean bernard nadeau

Domaine Giraud AOC Chateauneuf du pape

Vignoble de Chateauneuf du pape

Parfois de grandes rencontres se font véritablement par hasard, au détour d’une excursion. Nous étions à la recherche, comme d’habitude, d’un domaine plutôt accessible, ouvert et encore discret avec un fort potentiel. Il faut vous avouer que ce genre de mission se complique très rapidement sur un terroir comme celui du Chateauneuf du Pape, très convoité, à la notoriété mondiale.
Par chance, et le coup de pouce d’un collègue vigneron, on nous donna une adresse. Sur place, à l’extérieur encore du domaine, nous avons été un peu surpris par la hauteur de la porte. Ces gens se cachent, certainement. Mais de quoi ? Car, quand même, vivre ici, au coeur du village de Chateauneuf-du-Pape, ce doit être magnifique !!!
Une fois la porte ouverte, je crois bien qu’on oublie tout tant la famille Giraud vous ouvre les bras, en toute simplicité. Marie à la cave et François à la vigne, frère et soeur, s’appliquent à produire des vins élégants et raffinés avec une préférence affirmée pour les grenaches centenaires.Marie Giraud Chateauneuf du pape
Très vite, Marie vous transmet sa passion à chacun des verres que nous dégustons. Elle vous explique la patience et la prise de risque de voir vieillir les vignes comme l’importance de l’empreinte aromatique de chaque cépage dans l’assemblage. On ressent une force intérieure qui vient d’elle et se diffuse naturellement dans ses vins. La dégustation devient un beau moment où l’on prend plaisir à mémoriser les cuvées. Nous avons même le privilège de boire le grenache, tout frais puisé au tonneau, tout de vanille encore, la marque du chêne, de pain grillé qui n’en finit pas de durer sur la langue. Les saveurs nous sont inconnues. Le vin bouge encore en bouche, il est vivant. A ce moment, on comprend le travail de l’élevage, ce qui reste encore à faire pour avoir un assemblage fin et élégant.

La cuvée les Gallimardes, est une version moderne et originale du vignoble. Elle met en avant la fougue et l’énergie de la nouvelle génération.
Domaine Giraud Les gallimardes

 

 

La cuvée Tradition vous fera davantage découvrir la typicité du sol de Chateauneuf du Pape, recouvert de galets.
Domaine Giraud Tradition AOC Chateauneuf du pape

 

 

 

Vous retrouverez ces vins rares comme de nombreux autres dans la boutique ShowVin.com !

Beaujolais et vin nouveaux

Préparez-vous !
C’est pour le Jeudi 15 Novembre !
The Beaujolais Nouveau Time is coming
comme ils disent dans le vignoble du Beaujolais.

beaujolais time

 

On comprend qu’ils parlent anglais. En effet, la moitié de la production de Beaujolais se vend à l’export aujourd’hui ! Accrochez-vous…le Beaujolais écoule à l’année à l’étranger près de 63 millions de bouteilles. Et ce sont nos amis japonais qui en consomment le plus devant nos, non moins amis de toujours, les américains.
On va encore s’entendre parler (monologue franco-français) du Beaujolais Nouveau dans le genre : « Oui il a un goût de banane » ou bien « chaque année c’est pareille, on nous bassine avec le beaujolais nouveau. »
Et pourtant, il y a de quoi être fier quand même. Dire qu’après le champagne, c’est le vignoble qui bénéficie de la plus grande notoriété mondiale. Chapeau !

Si vous êtes curieux, vous devriez vous intéressez également aux vins nouveaux dans d’autres régions vinicoles. En Languedoc, par exemple, c’est presque chaque village où demeure encore une cave coopérative qui célèbre le nouveau vin dans des fêtes villageoises plus ou moins suivies. C’est l’occasion surtout, pour les habitants, de se retrouver après l’été, de goûter quelques marrons chauds et de s’enivrer modérément de ce nouveau cru, chaque année renouvelé.
Cette année, les vignerons se rappellent qu’il y a 100 ans, une révolte avait fait trembler tout ce petit monde. Une occasion de se dire que le vin c’est aussi ce qui rassemble, ce qui nous rapproche, comme un héritage mérité qu’on se doit d’entretenir.